mercredi 17 novembre 2010

[revue de presse] - [73] - [mercredi 17 novembre 2010]

Ce blog a battu, hier, son record de visites quotidiennes.

- BFM TV 17 Novembre 2010 :

Autre article :

Guillaume Dasquié, Libération 
"Le 9 novembre, dans le bureau du juge Renaud Van Ruymbeke, un témoin de premier ordre a désigné Nicolas Sarkozy comme le commanditaire, en 2006, de discrètes négociations portant sur deux sociétés offshore installées au Luxembourg.Gérard-Philippe Menayas, ancien directeur financier au sein de la société d’armement Direction des constructions navales (DCN), a raconté qu’entre octobre et novembre 2006, Sarkozy avait envoyé des messagers pour régler des questions touchant deux structures dédiées aux opérations financières occultes de la DCN, les sociétés Heine et Eurolux, notamment pour les maintenir en activité.
Homme clé. Initialement, l’audition de ce témoin avait pour objectif de comprendre plusieurs notes manuscrites, truffées d’initiales et d’abréviations, et rédigées entre le 3 novembre et le 21 décembre 2006. Des documents saisis il y a plus de deux ans à la DCN. Le cadre supérieur a expliqué qu’il en était bien le rédacteur et qu’elles représentaient une synthèse de ses discussions de l’époque avec Jean-Marie Boivin, homme clé des opérations douteuses de la DCN, organisées depuis le Luxembourg. Boivin, obéissant aux instructions données par Paris, utilisait notamment la société Heine pour payer discrètement des hommes politiques étrangers achetant des matériels de guerre à la France.
Sur les feuilles de Gérard-Philippe Menayas, on peut lire : «Les deux visiteurs du 26/10 étaient bien mandatés par NS» ; ils ont fait part à Boivin «de l’irritation des autorités françaises et lux quant aux courriers reçus, et plus part. le courrier reçu par NS». «Ils demandent le maintien en vie de HH et de €L…»

Nouvelobs, Serge Raffy
"Au départ, il y a un maître chanteur, un certain Jean-Marie Boivin, PDG d'une société luxembourgeoise, Heine, qui deviendra plus tard Eurolux. Selon divers documents, cette société a été créée en 1994 avec l'aval de Nicolas Sarkozy, alors ministre du Budget d'Edouard Balladur. Jean-Marie Boivin est un "compagnon de travail" de Menayas. Un as des montages financiers, jovial, polyglotte, jonglant les yeux fermés avec les sociétés offshore. Pendant des années, Menayas l'a accompagné dans sa gestion du maquis des sociétés-écrans. Il confirme au magistrat que Boivin, à travers la société Heine puis Eurolux, avait bien été recruté en 1994 pour "créer des plates-formes étrangères destinées à véhiculer des commissions sur des contrats" pour ne pas impliquer la DCN dans une comptabilité douteuse. Boivin le petit génie est chargé de ventiler l'argent des commissions des frégates vendues à Taïwan (contrat Bravo), à l'Arabie Saoudite (contrat Sawari II) et des sous-marins vendus au Pakistan (contrat Agosta). Il utilise une technique imparable, à double fond pourrait-on dire, ou à deux niveaux. Un premier niveau, que Boivin appelle la plate-forme de rang 1, où apparaissent les commissions légales versées aux intermédiaires, surnommés les "agents ". Un second niveau, plus opaque, moins avouable, la plate-forme de rang 2, où sont organisées les rétrocommissions. Dans l'une de ses perquisitions à la Direction générale des Impôts, le juge Van Ruymbeke a récupéré une note manuscrite et non signée, datée du 11 décembre 2006, rédigée vraisemblablement par un fonctionnaire du bureau CF2 de la sous-direction du contrôle fiscal, qui confirme les montages de Boivin. "1er étage: Luxembourg et Irlande. 2e étage : île de Man, Bahamas et îles Caïmans." Pour ce deuxième étage, la plate-forme de rang 2, selon la terminologie de Jean-Marie Boivin, le fonctionnaire ajoute : "Brouillage de piste par l'éclatement des sommes en cas de contrôle du bénéficiaire." Pourquoi donc brouiller les pistes sinon pour masquer l'illégalité de ces transactions, et donc la nature frauduleuse de cette "plate-forme de rang 2 " ?
Pendant dix ans, l'as des shadow companies vit sur un nuage...."

Nouvelobs
"L'ancien ministre de la Défense de Jacques Chirac, Charles Millon, entendu le 15 novembre par le juge Van Ruymbeke, vient de lâcher une petite bombe, en confirmant pour la première fois devant la justice, qu'il y avait bien eu des rétrocommissions dans les dossiers gérés par le gouvernement Balladur en 1994 et 1995. "En ce qui concerne le contrat pakistanais, a poursuivi Charles Millon, au vu des rapports des services secrets et des analyses qui ont été effectuées par les services du ministère, on a eu l'intime conviction  qu'il y avait eu des rétrocommissions." En d'autres termes : des retours d'ascenseurs financiers de la part d'intermédiaires qui ont reversé une partie de leurs propres commissions pour financer des hommes politiques français. Charles Millon a également confirmé devant le magistrat parisien que Jacques Chirac lui avait bien ordonné de mettre fin à ce système.
Lors de son audition, Charles Millon a déclaré : "le président de la République m'a dit, comme il l'a déclaré lors d'une conférence de presse aux alentours du 14 juillet (1995,NDLR), qu'il souhaitait une moralisation de la vie publique et politique et qu'il y avait trop de bruit autour des contrats d'armement dû à l'existence de rétro-commissions. Il m'a donc demandé de faire procéder à une vérification sur tous les contrats."  

La nouvelle république, Christophe Colinet
« Pendant six ans on a eu un juge qui se bornait à une piste - celle d'al-Qaida - alors que des éléments forts dans le dossier auraient dû le pousser à se poser des questions. De plus, notre ancien avocat ne travaillait que pour le ministère de l'Intérieur. Jusqu'en 2008, pendant six ans, jamais il ne nous a reçues dans son bureau pour faire un point sur le dossier et lorsque notre nouvel avocat est allé au Palais de justice pour demander une copie du dossier d'instruction, on s'est rendu compte que ça n'avait jamais été fait auparavant. C'est pour cela que le dossier avance enfin. Le changement de juge et d'avocat a fait la différence : ils veulent connaître la vérité. » 

Question : Qu'est-ce qui vous a permis de tenir tout ce temps ?

« Il y a une chose qui est certaine : il n'y a pas de haine. Il y a forcément de la colère, parce que quand on a vécu ce qu'on a vécu depuis huit ans et qu'on se rend compte que plus ça va et pire c'est, il y a de la colère. Mais pas de haine. »



Le Monde, Jacques Follorou
"C'est une véritable charge, signée par deux filles de victimes, Magali Drouet et Sandrine Leclerc. L'originalité de l'ouvrage réside dans l'absence de pathos et la description d'une quête de justice en butte à cette raison d'Etat qui devait, pensaient-elles, soutenir leur besoin de comprendre pourquoi leurs pères sont morts à Karachi.
Confrontées à ce drame, elles découvrent, dans un premier temps, l'impréparation de la DCN, dès lors qu'il agit de venir en aide aux onze familles touchées par l'attentat. L'accès aux corps est entravé et les informations sur les circonstances de l'attentat sont rares. Les familles sont contraintes de se prêter à des mises en scène.
Quant aux représentants de l'Etat, ils ne leur opposent que des mots. Michèle Alliot-Marie, alors ministre de la défense, se déclare joignable à tout instant sans même leur donner un numéro de téléphone. Cela n'empêchera pas Mme Alliot-Marie de communiquer en prétendant recevoir régulièrement les familles endeuillées, les choquant encore davantage.
Les revendications des familles de victimes, soucieuses aussi de voir la justice enquêter activement sur l'attentat, sont présentées comme des caprices, voire pis. Faute de rentrer dans le rang, elles sont accusées, par la DCN, de vouloir tirer un profit financier de la mort de leurs pères. Face à ce qu'elles considèrent comme "de la négligence" et "du mépris", elles vont découvrir l'utilité d'un allié, les médias..."